RESTAURANTS

L’Ours: une si fine tanière

Le chef Jacky Ribault déploie avec perfectionnisme une cuisine de produits bruts, avec délicatesse.

Gastronomique (Une étoile Michelin). €€. Vincennes.

On hibernerait bien tout l’hiver dans la taverne de cet ours-là. Le chef Jacky Ribault, aussi barbu que l’animal est empaillé, à l’entrée du restaurant, s’est concocté une antre élégante et spacieuse, où chaque détail est précis et étudié. A Vincennes, pour sa deuxième adresse après Qui Plume la Lune (Paris 11e), il a décidé de choyer ses ouailles : seulement 35 couverts dans ces 300m² de surface, pour ne pas se disperser, accorder l’attention nécessaire à chaque assiette et déployer une partition culinaire fine et équilibrée. Sur chaque table un majestueux bouquet de fleurs recrée l’intimité, sous la belle hauteur sous-plafond, d’où tombe un lustre dépareillé et des herbes folles.

L'Ours: une si fine tanière
La table du chef, située dans la cuisine
L'Ours: une si fine tanière
La salle principale du restaurant
L'Ours: une si fine tanière
la salle du restaurant
L'Ours: une si fine tanière
la cave à vin creusée à-même le sol, à l’entrée de la salle

    Dans ce décor poético-sauvage, à la fois brut et raffiné (sous-bois de cuivre et métal, acier, bois, cave enterrée et vitrée…) qu’on doit à l’architecte Caroline Tissier, deux grandes portes coulissantes s’ouvrent et se ferment selon l’humeur du chef, sur ses grands fourneaux et sa brigade. Les superbes assiettes brutes, en pierre, accueillent une cuisine de perfectionniste, sourcée (produits locaux), bio et de petits producteurs, qui salue les origines paysannes du chef (tout comme le couteau de chasseur, posé sur le set de table poilu, en guise d’accueil). Formé en Bretagne, puis à Chamonix, Gstaad, Zurich, Tokyo et Sendai, Jacky Ribault se fait aussi voyageur, ponctuant ses assiettes de yuzu ou d’un bouillon dashi (japonais) incroyable, de porc espagnol goûteux ou de pâte de haricot rouge Azuki… Pas de carte pour ce repas délicat, qui est orchestré de A à Z par le chef auquel on fait toute confiance. Il a baptisé ses menus en hommage à ses lieux préférés en Bretagne: le menu en 5 services s’appelle l’Aubinière; en six services, Le Theil-de-Bretagne et celui du déjeuner en trois temps, le Pilier.

    L'Ours: une si fine tanière
    Les amuses-bouches: escargot émulsion foie gras/sphère parmesan/maigre poivré
    L'Ours: une si fine tanière
    Gâtelet de sèche et algues nori
    L'Ours: une si fine tanière
    Noix de Saint-jacques, et risotto d’orge perlé, porc cecina, et cacao
    L'Ours: une si fine tanière
    Le pain dans une bannette en pierre brute et le beurre au yuzu
    L'Ours: une si fine tanière
    Oeufs de truite au saké, chou, et bouillon dashi, feuilleté au sésame
    L'Ours: une si fine tanière
    Anguille fumée du Val de Loire, charbon végétal et sésame
    L'Ours: une si fine tanière
    Le veau du pays basque/purée de patates et dattes
    L'Ours: une si fine tanière
    Assiette de fromages d’Ile-de-France
    L'Ours: une si fine tanière
    Les desserts: Miel et fromage blanc/millefeuilles pralin-citron/lait fermenté, yuzu, coriandre et macaron à la pâte de haricot rouge

      Ce soir-là, il pleuvait dehors mais peu importe, puisque les papilles étaient aux petits oignons: après un thé Puer millésimé 1998, presque terreux, qui ouvre cette “balade en forêt”, on poursuit vaillamment avec des amuses-bouche escargot émulsion foie gras, une sphère parmesan et un maigre poivré. On enchaîne sur un très photogénique gâtelet de sèche et algues nori, puis une Saint-Jacques parfaitement cuite et bien entourée d’un risotto d’orge perlé et d’une fine lamelle de porc cecina et cacao. C’est inventif, fin, savoureux. La culture nippone s’invite ensuite à table avec un superbe bouillon dashi japonais inondant des oeufs de truite au saké, du chou et un feuilleté au sésame addictif. Puis vient une anguille fumée du Val de Loire au charbon végétal et au sésame et un veau du pays basque, impeccable en bouche, serré par une purée de patates, dattes et émulsion de lait. Les fromages d’Ile-de-France crânent dans le créativité, comme ces lait de vache au curry ou un inédit brie… frais. Les desserts sont à la hauteur de ce qui précède: mille-feuilles pralin-citron, lait fermenté yuzu coriandre et macaron à la pâte de haricot rouge ou fromage blanc/miel. Surtout, ne pas hésiter à suivre les conseils avisés du sommelier, dans la formule accords mets-vins, qui débouche des crus parfaits pour chaque plat. A rugir de satisfaction.

      Charlotte

       

      Les signes distinctifs: les accords parfaits et raffinés entre la cuisine, les vins et la déco.

      L’Ours

      10-12, rue de l’Église, 94300 Vincennes

      Menus: déjeuner en trois temps 45 €; en cinq temps 75 €, en six temps 105 €. Avec accords mets-vins: 55€. Fromages d’Ile-de-France: 25€.

      www.loursrestaurant.com

      Charlotte Langrand

      Journaliste au Journal du Dimanche (JDD) rubriques Gastronomie-Cuisine, santé-bien-être

      Articles similaires

      Laisser un commentaire

      Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.

      Bouton retour en haut de la page