Il a pris lui-même la route, de la Bourgogne jusqu’à Paris, avec sa cargaison dans le coffre. Florent Jeannequin est un des derniers producteurs de cornichons français et il n’a trouvé que cette solution pour livrer sa marchandise à son distributeur parisien, La Maison Plisson, une épicerie de produits sourcés. Comme lui, ils sont des milliers de petits agriculteurs, paysans ou éleveurs à s’être retrouvés sans points de vente du jour au lendemain : alors que la grande distribution et les supermarchés tournent à plein régime, les artisans de qualité ont pris de plein fouet la fermeture des restaurants et des marchés, avec qui ils travaillent habituellement, loin des circuits industriels de masse.
Pour que les artisans de qualité ne soient pas sacrifiés
Pour que ces petits exploitants, qui travaillent dans le respect de la nature, ne soient pas sacrifiés, la résistance s’organise tant bien que mal. Et la filière doit jouer contre la montre : les saisons n’ont pas suspendu leur cours, les légumes continuent de pousser, les élevages de grandir et la période est cruciale : au sortir de l’hiver, la trésorerie des petits agriculteurs est souvent épuisée alors qu’il faut recruter de la main d’œuvre pour procéder aux semis de l’été…
Deux cartes interactives pour trouver les producteurs près de chez vous
Le Collège Culinaire de France (CCF), qui milite depuis dix ans pour créer un nouvel écosystème alimentaire basé sur la qualité artisanale, a donc contacté ses membres (1000 producteurs et 2000 restaurateurs) pour mettre en ligne une carte interactive qui répertorie dans toute la France, tous les lieux où se procurer leurs produits, frais ou préparés (lien vers la carte: cliquez ici. Cette initiative permet aux consommateurs de manger bon et sain, tout en soutenant les petits artisans : « Cette carte est un potentiel plan de survie pour eux, explique Célia Tunc, la secrétaire générale du CCF. Elle permet de repérer près de chez soi les producteurs qui mutualisent des points de vente-relais sur leurs exploitations et ceux qui livrent à domicile. »
Une autre carte collaborative vient aussi d’être mise en ligne via le compte Facebook du « Marché vert » (lien vers la carte, cliquez ici): elle recense les initiatives déjà existantes ou récentes, qui permettent aux consommateurs de se rendre dans les fermes, les épiceries paysannes, les points de distribution de paniers, les AMAP publiques ou de connaître les marchés ayant obtenu une dérogation du préfet, etc. On peut également connaître le mode d’agriculture pratiqué dans chaque endroit (permaculture, bio…) Un formulaire en ligne est à la disposition des producteurs qui veulent se faire connaître, la carte étant actualisée chaque jour (lien vers le formulaire : cliquez ici ).
Livrer aux particuliers plutôt qu’aux professionnels
Les solutions sont imaginées dans l’urgence, puisque ce réseau à taille humaine ne dispose pas encore d’une logistique aussi développée que le secteur de l’agroalimentaire. Mais la solidarité se met en place. La méthode la plus efficace pour ne pas perdre sa marchandise ? Transformer les livraisons aux restaurateurs professionnels en livraisons aux particuliers : Eric Roy, maraîcher spécialisé dans les mini-légumes, a ainsi pu envoyer ses colis d’artichauts, céleri-rave, poireaux et autres betteraves multicolores aux personnes intéressées, via ses réseaux sociaux : « J’ai pu faire 150 envois en dix jours, même si le service Chronofresh de la Poste s’est un peu détérioré cette semaine, par manque de personnel, explique-t-il. Nous devons le faire sinon, comment payer nos employés qui travaillent aux champs pour préparer la sortie de crise ? »…..