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Pommes de terre : du dégoût à l’adoration

Dans le film Délicieux d'Eric Besnard, on découvre que les goûts, en 1789, n’étaient pas les mêmes que maintenant, notamment en ce qui concerne la pomme de terre…

Le Film Délicieux, d’Eric Besnard, qui sort mercredi prochain, est un voyage gastro-temporel dans l’histoire de la création du premier restaurant. On y découvre aussi que les goûts, en 1789, n’étaient pas du tout les mêmes qu’aujourd’hui, notamment en ce qui concerne la pomme de terre, méprisée avant d’être adulée. Chronique à réécouter grâce au podcast de l’émission Culture-médias, de Philippe Vandel sur Europe1ou à lire ci-dessous:


Je vous convie aujourd’hui à un banquet chez le Duc de Chamford. Nous sommes en 1789, un peu poudrés et très perruqués, nous avons goûté à des plats somptueux…Quand soudain, tout se gâte : l’homme d’église à la droite du duc interroge le cuisinier sur les petits chaussons qu’on nous a servis en amuse-bouche et il apprend qu’ils contiennent… Des pommes de terre! Ecoutez les réactions des convives autour de la table…:

 

C’est donc la scène d’ouverture du film Délicieux, d’Eric Besnard qui sort mercredi, avec Grégory Gadebois et Isabelle Carré. On y conte l’histoire, un peu romancée, de la naissance du tout premier restaurant et de l’émancipation d’un cuisinier, Pierre Manceron, en dehors des cuisines des nobles. Et l’on y voit aussi à quel point les goûts peuvent changer du tout au tout, en fonction des époques.

Les racines? De la “nourriture pour cochons”

Pommes de terre : du dégoût à l'adorationAujourd’hui, un petit pâté à la truffe et à la pomme de terre, qui s’appelle Délicieux, aurait sans aucun doute sa place sur les tables étoilées. Mais voilà, à l’époque, la pomme de terre, le radis, les champignons, la truffe bref, tout ce qui poussait sous terre était « ignoble » et tout ce qui volait dans le ciel était au contraire du plus haut raffinement… Mais en vérité, derrière ces légendes alimentaires, il y avait une histoire de gros sous : l’Eglise à l’époque percevait des impôts sur tous les aliments, sauf sur les racines et voulait donc à tout prix en dégoûter les gens.

Gros échec : il existe aujourd’hui des milliers d’espèces de pommes de terre, sauvages ou hybrides, partout dans le monde. Elle est universelle, un peu comme les pâtes. Et elle a pris sa revanche… Elle est là à toute les saison et elle se prête à tout : sautée, en purée, en gnocchis, à la vapeur, gratinée, farcie… C’est presque impossible de recenser toutes les recettes à base de pommes de terre. Le tubercule est populaire ET chic à la fois : il y a en permanence huit variétés différentes dans les cuisines de l’Elysée. En 2017, on a servi même servi à Donald Trump, à la Tour Eiffel : du porc noir de Bigorre avec des pommes paille, faites à partir des belles de Neuilly-Plaisance, cultivées en Seine-Saint-Denis.

La recette-star de la pomme de terre: les frites

Parmi les innombrables recettes faites à partir de pomme de terre, la stra est incontestablement la frite. Pourtant, là encore, ce n’était pas gagné au départ, écoutez à nouveau un extrait de Délicieux :

 

Ca n’a tellement pas marché qu’on en consomme aujourd’hui onze millions chaque année. Avec la mondialisation des fast-foods, la Chine est même devenue le premier pays consommateur de pommes de terre… Mais c’est bien sûr en Belgique qu’on adule les frites. Là-bas, elles sont quasiment montées au rang artistique : c’est un repas à part entière, pas un accompagnement. On la mange dans des friteries, pas des restaurants.

Elles doivent absolument croustiller à l’extérieur et fondre à l’intérieur, sinon, ce ne sont pas de « vraies » frites ! Pour cela, le secret c’est de les cuire en deux fois : dans un premier bain de graisse animale (bœuf) pendant 7-8 minutes à 180 degrés max ; ensuite, on les laisse reposer 20mn sur une grille pour que la graisse s’écoule ; Et puis, deuxième bain de graisse végétale cette fois, à 170 °C pendant 7-8 minutes. Si c’est pas délicieux, ça, je ne m’y connais pas…


La recette du Délicieux

 

Ingrédients pour 20 Délicieux:

Pour la pâte à Valentin: 300 g de farine, 35g de fécule de pommes de terre, 250g de beurre, 5g de sel, 15g de sucre, 7cl de lait entier, 2 jaunes d’œufs

Pour la garniture: 600 g de grosses pommes de terre 50 g de truffe fraiche 120 g de graisse de canard 90 g de Cantal râpé Sel fin, poivre du moulin

Il est possible de réaliser cette recette en remplaçant les truffes par de la duxelles de champignons. Pour les plus gourmands, le délicieux est réalisable en forme de tourte en multiportions. Cette recette peut servir soit d’amuse-bouche, d’entrée ou même de garniture pour un plat de viande grillée.

Recette

Préparez la pâte à Valentin : Dans un saladier, mélangez la farine avec la fécule de pommes de terre, le sel et le sucre. Incorporez du bout des doigts le beurre préalablement ramolli. Terminez en incorporant le lait et les jaunes d’œufs, malaxez jusqu’à l’obtention d’une pâte lisse et homogène. Réservez au frais.

Préparez la garniture : Épluchez les pommes de terre et taillez en bouchons puis découpez en rondelles régulières d’un demi centimètre d’épaisseur. Chauffez dans une grande poêle la graisse de canard puis faites dorer les rondelles de pommes de terre jusqu’à ce qu’elles obtiennent une couleur dorée. Assaisonnez avec le sel et le poivre. Débarrassez et égouttez sur un papier absorbant. Réservez au chaud. Parallèlement, découpez en tranches fines les truffes.

Pour le montage : Chemisez des petits moules avec la pâte à Valentin que vous aurez préalablement étalée à l’aide d’un rouleau à pâtisserie sur le plan de travail fariné. Montez en superposition avec une rondelle de pomme de terre, une pincée de fromage râpé, une lamelle de truffe et répétez l’opération jusqu’en haut du moule. Recouvrez d’une fine couche de pâte et décorez avec des petits croissants de pâte que vous aurez détaillés à l’emporte-pièce. Préchauffez le four à 180°C et enfournez pour 35 minutes. Sortez du four et dégustez bien chaud.

Une recette élaborée par Thierry Charrier et Jean-Charles Karmann, consultants culinaires pour le film

 

Charlotte Langrand

Journaliste au Journal du Dimanche (JDD) rubriques Gastronomie-Cuisine, santé-bien-être

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