Ce soir, les restaurateurs franciliens ont enfin entendu de la bouche d’Emmanuel Macron qu’ils étaient autorisés à rouvrir leur établissements, salles intérieurs comprises, dès demain, lundi 15 juin. Jusqu’à aujourd’hui, les restaurants parisiens et franciliens restaient inégalement répartis entre ceux qui avaient pu ouvrir en extérieur, grâce à l’initiative de la Mairie de Paris d’autoriser l’élargissement des terrasses, et ceux qui ont dû rester fermés, faute de place sur l’espace public pour le faire. Mais malgré la fin de l’interdiction, l’été 2020 sera-t-il meurtrier pour les restaurants franciliens ?
Des terrasses mais un chiffre d’affaire insignifiant
Après deux mois et demi de fermeture stricte, la profession est à cran. Elle a dû s’adapter aux annonces du gouvernement et aux protocoles sanitaires, tout en gérant le personnel, les stocks et les pertes de revenus. « Il est vraiment temps que nous puissions tous rouvrir, estime Hubert Jan, responsable de la branche restauration à l’Umih, le principal syndicat du métier. Elargir les terrasses parisiennes était une bonne chose pour montrer que nous étions toujours là mais notre chiffre d’affaire est insignifiant… et nous n’avons pas été aidés par la météo, pluvieuse. »
L’été qui se profile est pourtant inquiétant : les Parisiens resteront-ils à Paris ? Les touristes -français et européens- viendront-ils ? Iront-ils au restaurant ? La crise économique qui se profile pourrait voir 20 à 30% des établissements mettre la clef sous la porte d’ici la fin de l’année… « C’est l’incertitude totale, constate Antonin Bonnet, chef du restaurant Quinsou à Paris (6e), qui projette d’ouvrir une terrasse. Il n’y a rien de pire que de travailler pour la moitié de son chiffre d’affaire : nous ne pouvons pas rouvrir juste pour faire plaisir, c’est une question de survie… Si les clients ne sont pas là cet été, ce sera très compliqué. » Certaines fermetures définitives ont hélas déjà été annoncées, comme le restaurant bistronomique Le Galopin (10e), du chef Romain Tischenko. Julien Duboué ne rouvrira pas non plus l’un de ses trois restaurants, la Dalle, à La défense. Le chef Alexis Braconnier a lancé une cagnotte de soutien pour sauver son adresse de street-food australienne, Aussie (Paris 11e).
5200 demandes de terrasses et 110 de piétonnisation à Paris
A Paris pourtant, les services de la Mairie ont enregistré plus de 5200 demandes d’extension de terrasses et plus de 110 requêtes de piétonnisation de rues. Dans le 14e, les rues Daguerre et la rue du Château devraient obtenir le feu vert municipal, tout comme le bas de la rue Mouffetard (5e). « Il est difficile de faire des projections car la situation est inédite et changeante mais malgré la météo, de nombreux Parisiens sont venus en terrasses, par solidarité et pour retrouver leur liberté, constate Olivia Polski, adjointe au Commerce d’Anne Hidalgo. De plus, l’été à Paris est toujours très agréable, surtout avec la perspective d’une petite fête de la musique et l’éventuel retour des touristes européens… La vie reprend. »
L’ouverture estivale des restaurant reste donc l’affaire personnelle de chaque cuisinier. Le chef italien de Racines (2e), Simone Tondo, sans terrasse, a décidé de rouvrir en septembre, pour préserver son personnel. Trois chefs du jury de l’émission Top Chef, Michel Sarran, Philippe Etchebest et Hélène Darroze, ont tourné un spot pour encourager les Français à retourner au restaurant, avec le hashtag « #ensembleauresto ». Et certains veulent croire à la résilience de la profession, comme le chef des restaurants parisiens Yaya, Vida et Plantxa, Juan Arbalaez, toujours optimiste : « Nous allons ouvrir et nous verrons comment cela se passe au jour le jour. Mais ce qui est sûr, c’est que nous attendons les franciliens à bras ouverts ! »
Charlotte Langrand
