La table royale
Royal Palm
Au cœur d’une oliveraie centenaire de 230 hectares, cet immense palace se paie le luxe de n’avoir pour vis-à-vis que la beauté de l’Atlas. Le Fairmont Royal Palm est une bulle de sérénité, à l’écart de la vibrante Marrakech (12kms). Il constitue une destination en soi, avec ses allures de conte de fée oriental (bois sculpté, lustres de métal, zelliges…), son golf de 18 trous et son océan de verdure (palmiers, orangers…) qu’on parcourt en voiturette.
Arrivé en Août 2018, le chef cuisinier Serge Jost endosse la mission délicate de satisfaire les estomacs disparates de cette clientèle internationale. Difficile de déployer une cuisine d’auteur lorsque 250 plats sont inscrits aux menus des quatre restaurants (« international », marocain, méditerranéen, country club). Mais le chef strasbourgeois, passé au Ritz et dans des palaces à Montréal, a décidé d’apporter une démarche écolo-locale au resort, en exploitant sa ferme biologique de 5 hectares : arbres fruitiers (amandes, citrons géants, olives…), œufs bios, miel des ruches et des légumes rares à trouver localement (mini-carottes, fraises des bois, navets ronds de Tokyo, absinthe, fleur de capucine comestibles…) Les restes d’oranges pressées du petit-déjeuner finissent en compost.
Au restaurant l’Olivier, qui domine l’immense piscine, ce fils de viticulteurs affirme une cuisine bio légumière et locale, comme avec cette aile de raie d’Oualidia à l’huile de citron beldi et taboulé de quinoa aux légumes ; des linguinis aux palourdes et couteaux des côtes marocaines à l’écume de persil. Les citrons du jardin eux, ont servis pour une tarte sablée rafraîchissante. Le tout arrosé d’un joli vin gris local.
Et aussi – Le Royal Mansour
L’excellence marocaine se joue au Royal Mansour : voulu et financé par le roi du Maroc, ce palace sublime et raffiné s’est récemment doté d’un restaurant avec piscine, le Jardin, qui fait la part belle à la cuisson à la braise et aux cuisines du monde. A la direction des cuisines des 4 restaurants, le chef triplement étoilé Yannick Alléno revisite les plats marocains et français. On peut aussi pénétrer dans ce havre de paix aux portes de la Médina pour boire le thé à la menthe ou goûter aux délicieux cocktails.
La table marocaine revisitée
Nomad
Se perdre dans les souks puis prendre de la hauteur… Le Nomad est un restaurant à plusieurs niveaux, à 5 minutes à pied de la bouillonnante place Jemaa El-Fna, qui se termine en roof top avec vue à 360 degrés sur la médina), entre ombre et soleil (les chapeaux de paille sont à disposition !). Kamal Laftimi, ancien vendeur d’épices devenu entrepreneur, a installé son 5e établissement dans cet ancien magasin de tapis de la Rahba Lakdima (Place des épices) La décoration de Romain Meunière, toute en déclinaison de beige et motifs noirs et blancs, est minimaliste, chic et cool mais résolument moderne, tout comme la cuisine, qui réveille la tradition marocaine en la passant au filtre des alimentations actuelles : végétarisme, pescetarisme, « sans gluten » et carnivores trouveront tous leur compte dans ces assiettes de produits frais et locaux.
On partage un mezze de saison, assorti d’olives marinées et de pain maison au yaourt avec une pastilla végétarienne, une version légère mais délicieuse de ce grand classique, farcie de légumes et d’épices, de fromage de chèvre, de tomates et d’oignons caramélisés. Les viandards auraient trouvé leur bonheur dans un os à moelle rôti au cumin et citron confit. Les calamars d’Agadir, sauce tomate aux anchois, gingembre, cumin et fenouil braisés ne manquent pas de caractère tandis que la très tendre cuisse de poulet aux abricots, dattes, citron, gingembre et safran achève d’installer notre appétit dans les saveurs du pays. Enfin, si les glaces à l’hibiscus ou à l’huile d’argan valent le coup d’essai, on retient ce moelleux à l’orange sans farine, aux zestes d’orange caramélisés et chantilly, véritable piège à gourmands.
Et aussi – Le Jardin
Faites un tour au Jardin, au cœur d’une bâtisse du XVIe siècle, l’établissement se décline sur le même principe que le Nomad (même propriétaire). Au menu, des plats marocains et européens : mezze, salades, brochettes, tajines…
La table de femmes
La Famille
Marrakech ne compte pas beaucoup de tables végétariennes. Pourtant, la richesse des épices, des herbes et des céréales locales sont une aubaine pour ce type de cuisine. C’est ce qu’à compris Stéphanie Giribone, la patronne de La Famille, restaurant atypique à plus d’un titre : en cuisine et en salle, ce sont les femmes qui s’activent, aussi souriantes au service que douées aux fourneaux. Son restaurant à ciel ouvert, même situé en plein souk et à quelques mètres du palais Bahia, est un havre de paix : cour et cuisine ouverte, ombragées d’arbres et animées par le chant des oiseaux ; grandes tables en bois à partager.
Pour la petite touche « détox », des carafes d’eau infusées de citron et de menthe attendent sur chaque table. La carte est courte mais alléchante, avec chaque jour une salade, un plat de pâtes, une pizzeta et un dessert. Les « dips » de crème de roquette/citron confit et crème de potiron/sauge sont addictives, tout comme le formidable pain au thym et sésame qui les accompagne ; les farfalle/blette grillée/fromage frais/datte/noix est un mélange gagnant, savoureux et réconfortant et la pizzeta crème de choux rouge/coriandre/pêche/graine de courge forme un duo réussi avec la salade de laitue/tomate cerise/cacahuètes/menthe et raisin sec. On a déjà plus faim mais les desserts, posés sur le comptoir de la cuisine ouverte, ont retenu notre œil : un cheesecake au lait de coco qui vaut le détour tout comme le gâteau à la confiture de coing thé vert et ananas.
Et aussi – Al Fassia
El fassia : un classique de la ville depuis 25 ans, pour manger 100% marocain, dans le quartier de Guéliz : une brigade de femmes propose soupes traditionnelles, kebabs, tajines, coucous et autres pastillas dans la plus pure tradition culinaire.
Charlotte Langrand
La table d’ailleurs
Café de la Poste
On pénètre au Café de la Poste comme dans une institution. Situé à Guéliz, en-dehors des remparts de la Médina, ce restaurant était un ancien relais postal-hangar à cheval puis le café réputé de son propriétaire, le pacha El Glaoui. Repris en 2005 après une longue fermeture, il a été décoré dans un style rétro-colonial et cultive une atmosphère de brasserie chic et surannée, toute en lumière tamisée, banquettes en cuir, frise mauresque, damier au sol, escalier magistral et bar-jazz (à l’étage), où l’on s’attend à voir les cigares sortir des vestons.
L’endroit est devenu le point de rendez-vous des résidents français de Marrakech. On s’adresse ici aux appétits qui aspirent à faire une pause avec la cuisine locale : la carte est française mais le chef Philippe Duranton met un point d’honneur à la réaliser avec des produits marocains : foie gras de canards de la ferme Berada à Casablanca ; couteaux d’Essaouira, légumes d’un maraicher local bio, dont le très attendu « plat de tomates oubliées » (28 variétés)… Pour le reste, la carte décline les classiques de la brasserie : des Saint-Jacques en carpaccio, avocat et pamplemousse ou préparées « aux saveurs d’Orient », selon la recette de sauce orientale aux 57 épices du chef étoilé Michel Trama, beau-père de Philippe Duranton ; ceviche de dorade et mangue ; foie gras… Une souris d’agneau ultra-fondante avec purée ou un plus local tajine de lotte et gambas. On sautera le camembert à la truffe du Périgord pour finir avec une jolie pavlova aux fruits rouges.
Et aussi
Dépaysement total au Plus 61, où l’on goute une cuisine australienne à partager, servies dans un décor épuré façon design scandinave. Pain, pâtes, yaourts et fromages sont faits sur place.
La table cachée
Villa des Orangers
Ici, rien d’ostentatoire. On passerait presque devant l’entrée sans la voir, en allant vers la Koutoubia. Ce Riad transformé en hôtel de luxe a effectué sa mue dans la délicatesse, le raffinement et le respect de cette ancienne demeure traditionnelle datant des années 1930 : patios plantés d’orangers, fontaines, galeries d’arcades sculptées, bois précieux, tadelakt et zelliges, salons intérieurs pour les soirées d’hiver ou jardin verdoyant pour les beaux jours…
Le soir venu, les abords de la piscine dans le patio principal, offrent un cadre idéal pour les dîners romantiques. On y déguste une cuisine méditerranéenne tintée de légers clins d’œil marocains : les ravioles de gambas et mangue au citron vert, crème de coco au curry sont généreuses et gouteuses ; le bissara (velouté) de pois chiche au cumin et à l’huile d’olive est une bonne idée, quoique qu’un peu trop salé mais le fringuant filet de dorade à la vapeur/infusion de gingembre, épinards et émulsion au citron et la pastilla aux fruits de mer sont très bien troussés. En dessert, un amusant « Paris-Marrakech » au cacao et praliné ambou (huile d’argan et amande) se partage avec plaisir.
Et aussi – El fenn
El Fenn : Cet autre riad totalement rénové dans le respect de la tradition et avec quelques touches de décoration moderne offre son toit-terrasse pour un déjeuner ou dîner sous les étoiles ou les bords de sa piscine pour un cocktail.
Charlotte Langrand