Toujours en recherche de nouveaux concepts, le petit monde de la cuisine se prend régulièrement de passion pour des ingrédients inattendus, souvent issus de la « nourriture-santé ». En ce moment, le charbon végétal, l’eau de coco et le kéfir.
Charbon actif
C’est un ingrédient vieux comme le monde mais son apparition récente en cuisine est devenue un phénomène de mode. Sur les réseaux sociaux, il fait voir la vie en noir aux smoothies, cocktails, crêpes, viennoiseries, baguettes et même aux burgers et aux pizzas. D’habitude, le charbon végétal se trouve plutôt au rayon beauté ou santé : ses vertus purifiantes et apaisantes pour la peau le portent à la composition de nombreuses crèmes et masques ; ses bienfaits pour le système digestif (anti-ballonnements, drainage du foie…) permettent d’absorber les toxines du corps. Ce sont donc d’abord les cantines « healthy » qui l’ont plébiscité.
Au bois tendre ou de coco
Ce pedigree lui ouvre désormais les portes des restaurants. Mais rien ne sert de se ruer sur les braises de son barbecue. Ici, on utilise du charbon actif issu de bois tendres ou de coques de noix de coco. « C’est un remède ancestral utilisé depuis longtemps en médecine pour éliminer les poisons ou l’excès d’alcool dans l’organisme », explique Amélia Wasiliev dans son livre « super charbon » (Marabout). Obtenu à partir de la calcination du bois à très haute température, on le traite ensuite avec de l’oxygène et de l’eau, créant ainsi des aspérités qui vont attirer les particules indésirables accumulées dans le système digestif. Ainsi, il ne fait que transiter dans le corps.
Le charbon n’a aucun goût mais certains chefs cuisiniers l’utilisent pour exploiter son effet visuel indiscutable. Ainsi, on retrouve des gnocchis poêlés au charbon végétal chez Substance, l’épatant restaurant de Mathias Marc ; Amélie Darvas, cheffe étoilée à Vailhan, l’utilise dans sa meringue marbrée ; le boulanger Kayser a imaginé un sandwiche au pain noir et à l’avocat, roquette et Granada Padano ; enfin, le chef du restaurant Ar Iniz à Saint-Malo le cuisine avec des noix de Saint-Jacques.
Coco à boire
Si vous n’avez pas la chance de vous prélasser sur une plage de sable fin, vous pouvez fermer les yeux et plonger une paille dans une brique d’eau de coco… Vous aurez peut-être l’illusion de vous désaltérer comme si vous y étiez. En quelques années, l’eau de coco a suscité l’intérêt grâce à sa fiche d’identité de superaliment : elle serait deux fois moins calorique qu’un soda ou un jus de fruit. Les grands sportifs la plébiscitent pour ses teneurs en magnésium, potassium et en vitamine C, qui faciliteraient la réhydratation et diminueraient les crampes.
Plébiscité par Madonna
Il ne faut pas la confondre avec le lait de coco, très utilisé dans la cuisine thaïlandaise, dans les soupes ou les currys, qui est beaucoup plus calorique (et savoureuse). L’eau douce en question est captée par le cocotier pour son hydratation et est stockée dans les jeunes noix. Elle est depuis longtemps prisée en Asie et au brésil mais ce sont les stars américaines qui ont contribué à son succès, comme Rihanna, Matthew McConaughey, Demi Moore ou Madonna, qui a investi des millions de dollars dans la marque Vita Coco. Celle-ci est vendue en France, aux côtés d’autres marques comme Vaï Vaï. Les bartenders en font des cocktails et les cuisiniers « healthy », des smoothies ou d’éternels « poke bowls ». Seul souci, les vertus de superaliment de cette eau ne seraient pas aussi miraculeuses que les marques le disent… Et plonger sa paille dans une bouteille en carton aura toujours moins d’effet que dans une vraie noix de coco.
Kéfir, superaliment vivant
A première vue, il ressemble à un amas de petits morceaux de choux-fleurs gluants. Au contact de l’eau ou du lait, cet ensemble de bactéries et de levures se transforme en une boisson fermentée, dont les vertus sur le système immunitaire et la flore intestinale se transmettent de bouche-à-oreille depuis des millénaires. Le « kéfir » est consommé sous la forme d’une boisson-santé riche en probiotiques qui se prépare selon deux recettes, le kéfir d’eau (ou de fruits), une boisson pétillante et désaltérante et le kéfir de lait, qui ressemble davantage à du lait ribot.
La fermentation, nutritionnelle et gastronomique
Choux, pickles, produits laitiers, miso… Les aliments fermentés ont la cote en cuisine, tant ils sont bons pour la santé et pour le goût. « Le produit fermenté a une dimension symbolique et culturelle qui transcende celle de la simple qualité nutritionnelle et gastronomique », explique l’historienne de l’alimentation Marie-Claire Frédéric, sur son blog, nicrunicuit.com. Celle-ci a d’ailleurs collaboré sur le sujet avec le chef Yannick Alléno, et vient d’ouvrir son restaurant, Suri, dédié à la fermentation naturelle. La cheffe pâtissière du Plaza Athénée à Paris, Jessica Préalpato, donne aussi sa recette du « kéfir citron, yuzu et épices » en bocaux, dans son dernier livre consacré aux desserts et à la naturalité (Desseralité, Ducasse Editions). Enfin, une jeune marque vient de lancer ses « sodas » naturels, qui allient les ferments naturels de kéfir à des infusions de fruits bios. Son nom ? Kéfiz.
Charlotte Langrand