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La cuisine juive tunisienne d’Aurélie Saada

Les recettes de cuisine juive séfarade sont présentes dans tout le premier film de la réalisatrice, ex-chanteuse du groupe Brigitte. L'occasion de revoir les influences de cette cuisine

La cuisine juive, séfarade ou ashkénaze, est une cuisine familiale, affective, riche de sens et d’histoire; Elle rassemble les gens autour de grandes tablées et a ses plats-phares, d’Europe de l’Est ou mediterranéens. Chronique à réécouter en cliquant ici, grâce au podcast de l’émission Culture-médias, de Philippe Vandel sur Europe1, en compagnie de la chanteuse et réalisatrice Aurélie Saada, qui sort son premier film, Rose, avec Françoise Fabian. A lire aussi ci-dessous:


Il y a un personnage caché dans votre film, Aurélie, c’est la cuisine ! Elle est là, presque à chaque plan, c’est un personnage à part entière de l’histoire : la toute première image s’ouvre sur des pièces montées ; au générique de fin, vous remerciez la fleur d’oranger, les fritures qui chantent et les gâteaux aux amandes… Tout au long de l’histoire, il y a des grandes tablées familiales, les plats du jour du café du coin et on fait même un détour chez Bob de Tunis… Car ce n’est pas n’importe quelle cuisine dont vous parlez : c’est la cuisine juive tunisienne séfarade.

Dans cette culture, tout se passe autour d’une table : on s’énerve en mangeant, on parle des choses importantes de la vie en mangeant, on se dit qu’on s’aime en mangeant, on célèbre les Fêtes juives en mangeant… C’est la pudeur des sentiments qui se cache dans la nourriture, qu’on utilise pour dire les choses sans trop se dévoiler.

Rose n’échappe pas à la règle : quand elle est chamboulée, elle rate ses boulettes de viande ; quand elle est triste, elle se console avec la vodka aux amandes qu’adorait son mari et elle dit qu’elle aime avec des makrouds…

Une cuisine juive familiale qui vient de loin

La cuisine juive tunisienne d'Aurélie Saada
Les hallots et babkas de Babka Zana (à Paris rue Condorcet)

Alors, la cuisine juive est assez vaste… C’est à la fois une cuisine de diaspora, basée sur l’immigration, riche de sens et d’histoire. Elle a des influences multiples : turques, libanaises, syriennes, tunisiennes, autrichiennes… Avec d’un côté des recettes de mémoire de la branche ashkénaze, d’Europe de l’Est, avec du gefilte fish, des harengs, de la soupe de poulet ou du pastrami et la branche séfarade et moyen-orientale, avec ses poivrons, sa chakchouka, ses couscous, ses kémias… Tous ces plats que l’on se passe au shabbat, à Rosh Hashana (nouvel an) ou pour Hanoucca, la fête des lumières, qui s’achève dans deux jours !

Et il y a la cuisine israélienne avec aussi ses marqueurs levantins : houmous, tehina (crème de sésame), beaucoup d’herbes et d’épices (sumac, zaatar), beaucoup de grenade, de baba ganoush et le très à la mode chou-fleur rôti… Il y a beaucoup de plats végétariens, ce qui la rend très moderne. Elle a été exportée d’Israël par des chefs comme Yotam Ottolenghi, qui a vendu des millions de livres dans le monde. Il y a aussi Eyal Shani à Paris avec (Miznon) et Assaf Granit (Shabour), Salatim, Shouk, Tavline ou Adar ; Massa à Bordeaux, Yima à Marseille. Pour vous faire une idée de cette cuisine israélienne.

La cuisine juive tunisienne et ses recettes spécifiques

La cuisine juive tunisienne d'Aurélie SaadaC’est une cuisine plutôt modeste à la base mais très instinctive et très généreuse dans l’assiette. On peut citer par exemple le Pkaïla, un couscous du vendredi soir moins connu, de couleur verte très foncée, presque noire, à base d’épinards frits, de haricots blancs, de menthe et de bœuf et de semoule ; Ou la mloukhia, noire aussi, avec un mélange d’épices très spécifique ; la aricha (viande cuite à l’étouffée, tomate, paprika, curcuma, cannelle…) ou les pommes de terre à la harissa, pilier des kémias tunisiennes… (+ cumin)

Vous trouverez toutes ces recettes de shabbat inspirées des mères et grands-mères dans le joli livre « Shabbat dinners » de Vanessa Zibi aux éditions de La Martinière. Où l’on voit très bien qu’au-delà des fêtes religieuses, c’est aussi une cuisine de transmission familiale et de souvenir, exactement comme dans votre film, quand Sarah, la fille de Rose, dit qu’elle a failli appeler son père pour la recette des boulettes… Donc demandez leurs recettes à vos parents avant qu’il ne soit trop tard !

Aurélie, vous publiez quelques recettes sur votre compte Instagram, notamment de hallots, ces brioches tressées typiques du shabbat. Voici celles, entre autres, de la boulangerie Babka Zana (rue Condorcet à Paris dans le 9e) Il paraît que vous en avez même croisé une brioche tressée avec une focaccia italienne, en rajoutant du romarin et je crois que vous parlez à votre levain… C’est vrai?

 

Charlotte Langrand

Journaliste au Journal du Dimanche (JDD) rubriques Gastronomie-Cuisine, santé-bien-être

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